dimanche 15 septembre 2013

Ce qu'il faut pour vivre...(après un cancer)

Christian Bobin écrivait:
"À quoi reconnaît-on les gens fatigués. À ce qu'ils font des choses sans arrêt. À ce qu'ils rendent impossible l'entrée en eux d'un repos, d'un silence, d'un amour. Les gens fatigués font des affaires, bâtissent des maisons, suivent une carrière. C'est pour fuir la fatigue qu'ils font toutes ces choses, et c'est en la fuyant qu'ils s'y soumettent. Le temps manque à leur temps. Ce qu'ils font de plus en plus, il le font de moins en moins. La vie manque à leur vie. 
(Une petite robe de fête, coll. folio #2466, p. 27)

Il semble que cet extrait de livre décrit bien le lieu où se trouvait Lyne en juillet 2012, alors qu'on lui apprend qu'un cancer s'est logé dans son sein. Dans le rythme effréné des "il faut", nul n'avait imaginé qu'une danse obscure s'exécutait en douce, s'alimentant des hormones qui jusque-là l'avaient accompagnées dans son devenir de femme.

Après six mois de chimiothérapie, une chirurgie et 29 traitements en radiothérapie - les derniers traitements ont probablement été les moments les plus douloureux, toute chose étant très relative - Lyne se retrouve aujourd'hui, en septembre 2013, avec non seulement un cancer en moins (rien n'est jamais sûr à 100%, mais nous osons l'espérer), elle a également acquis une meilleure compréhension de ce qu'il lui faut pour vivre.  Depuis déjà bien longtemps, l'envie de se consacrer à son art sommeillait en elle.  De mon côté, je savais que l'art la faisait vivre: combien de fois je l'ai vue flotter dans son atelier à mon retour du travail (elle ne s'y retrouvait cependant qu'un jour par semaine avant juin 2012) ; devant sa toile, elle retrouve son souffle, son rythme. Toute épreuve apporte une lumière.  C'est sous cette lumière que Lyne a décidé de quitter l'emploi qu'elle occupait depuis les cinq dernières années et de prendre le temps de créer. Nous avons eu amplement le temps d'en discuter durant ma demière année en sabbatique. Ce choix ainsi que d'autres sur le plan de la nutrition et de l'activité physique sont porteurs d'avenir.  Dans notre demeure, l'air est rempli d'une plus grande sérénité. 

Depuis quelques semaines, je suis de retour au travail avec une nouvelle cohorte d'élèves à découvrir et à accompagner dans leur cheminement, j'ai retrouvé mon badminton, je ne cuisine malheureusement plus autant qu'avant. À mon retour à la maison, ma Lyne respire et me regarde, parfois sans rien dire, avec en tête des tonnes d'idées pour sa prochaine toile. Je suis heureux.

samedi 20 avril 2013

Arrêt obligatoire


Mardi dernier, je passais finalement au bistouri, question de retirer traces et empreintes laissées par la masse cancéreuse dans le sein et aussi enlever les quelques ganglions lymphatiques sous l’aisselle qui étaient également atteints par le cancer. Nous aurons les résultats de la pathologie d’ici 4 semaines. Seconde étape terminée. Et maintenant…

Arrêt obligatoire. Quelques exercices à faire trois fois par jour afin que les bras et les épaules ne deviennent pas ankylosés plus qu’ils ne le sont déjà. Trop ou pas assez d’exercices? Ce fut l’obsédante question des derniers jours. L’infirmier du CLSC  vient aux trois jours pour changer mes pansements. La guérison semble bien progresser. Je souffre davantage d’engourdissements dans les bras et les mains que de la chirurgie.

Je suis tellement reconnaissante envers Marc. Il est présent pour moi depuis le premier jour de notre encontre, mais je n’en reviens pas comme il s’occupe de moi. Je me sens tellement aimée, appréciée, choyée. Que je suis chanceuse!

lundi 25 mars 2013

Le silence monastique


En route vers Boston, je craignais que nous ayons dû annuler notre voyage. Marc se remettait à peine d’une pneumonie, moi d’une grippe. La lourdeur dans mes jambes m’empêchait de marcher plus d’une quinzaine de minutes à la fois et me tenir debout sur place plus de quelques instants me semblait quasiment impossible.  Marc a tout de même eu l’idée géniale de partir une journée précédant la tempête de neige prévue; une journée donc, pour se reposer dans un hôtel, et une autre pour visiter un coin choisi de la ville, quelques galeries d’art et sites historiques. Nous étions maintenant prêts à nous rendre à notre destination principale, le monastère de Cambridge (SSJE) où nous allions passer quatre jours.  

En faisant la tournée du monastère dès notre arrivée, Tom nous avise que notre chambre, la seule avec un grand lit, donne sur la chapelle et, que allions ou non à la messe, il serait impossible de ne pas l’entendre. Nous avons tout de suite découvert que derrière les portes de ce qui semblait d’abord être un grand placard se trouvait un tout petit balcon de pierre situé sur le haut du mur intérieur de la chapelle et révélait une vue stupéfiante sur l’ensemble de celle-ci.

Quatre journées de silence presque complet, même au moment des repas en compagnie des moines. Quatre jours à entendre, cinq fois par jour, à compter de six heures le matin, les psaumes chantés par les moines. Je suis tombée, par hasard, au bout de quelques jours, sur un livre magnifique de Thomas Merton sur la prière contemplative à la bibliothèque du monastère. En référant à des textes anciens sur le sujet, il parle beaucoup du silence et de la méditation, mais nous incite à aller plus loin dans une démarche de prière simple, primitive même, qui émane du cœur. Les moines de ce monastère respectent donc les traditions monastiques des premiers moines du douzième siècle, les moines du désert, dont les prières étaient basées sur les psaumes. Avec l’assistance et la générosité de quelques-uns des moines nous ayant initiés à leur pratique, nous avons eu la chance d’écouter surtout et de participer à ces chants simples et touchants que sont les psaumes. Après la prière du soir, alors que régnait à nouveau le silence, nous prenions plaisir à nous blottir sur notre petit balcon de pierre afin de prendre le temps de penser à chacun de nos enfants, nos familles et nos amis, afin de leur envoyer de l’amour et de la paix. Il faisait bon de s’endormir.


samedi 16 mars 2013

Fin de traitements


J’attends depuis des semaines la fin de ces traitements et m’y voilà enfin, mais cela ne signifie pas pour autant la fin, du jour au lendemain, de tout ce qui m’accable à cause de ce cocktail de médicaments qui agiront en moi pendant le prochain mois tout au moins. Je me permets de m’apitoyer sur mon sort; j’ai ben le droit. D’abord, j’ai mal à peu près à tous les muscles de mon corps. J’ai les jambes tellement lourdes que faire mon Qi Gong une trentaine de minutes me demande un bon effort. Lorsque je reviens d’une marche, je dois ralentir le pas en montant la « côte » que je n’avais jamais jusqu’à maintenant remarquée et reprendre mon souffle. J’ai certainement pris du poids, mais je peux vivre avec ça. J’ai toutefois de la difficulté à regarder mon visage enflé et rougi – j’ai même le tour des yeux rouge et bouffi! Maintenant, je dois composer avec un gros orteil infecté et prendre le temps de me tremper les pieds dans une solution désinfectante. Depuis plusieurs jours, Marc traite une pneumonie. Voilà que depuis hier j’ai moi aussi mal à la poitrine et je commence à tousser. Nous avons prévu, il y a quelques mois, une retraite dans un monastère de Boston suivant mes traitements. Le départ est prévu pour mardi, c'est-à-dire la semaine prochaine. Si nous n’allons pas mieux, il faudra remettre le voyage.

Mettons que, en ce moment, il m’est difficile de demeurer positive. Ça va tu arrêter maudite marde!? Je veux retrouver ma santé, je veux vivre! Ça va passer, je le sais ben, mais pour aujourd’hui, je suis en tite boule.  

dimanche 17 février 2013

Des grains d'un blanc sombre

C’est une toile blanche d’une neige nouvelle à peine déposée. Aucun faux pas sur l’immaculée, aucune ombre, que l’aurore d’une vie dans la lumière qui s’étale. En attente du geste, elle invente un langage, s’étire dans le désir, enfante des milliers de demains habillés d’un souffle ingénu. 

Des pas ensuite. Des pas lents, inconnus, et des teintes de sable que soulève le vent.  Alors que l’aube s’engonce dans un voile obscur, au  cœur s’incrustent  les premiers grains d’un blanc sombre à perte de vue. Le gris se dépose au bout des lèvres. Angélique.
La nuit s’installe; sous des airs ténébreux, implore l’indulgence du regard. Dans une valse de clair-obscur, une colombe pose sa tête contre l’aile d’un corbeau.  Du sombre émane un fragile parfum de vérité; du clair, une  paix intense.
Tout est parfait.
Texte de Marc Vachon

mardi 5 février 2013

La situation des globules blancs au fil des traitements


Il y a quelques semaines, je vous ai mentionné que nous faisions une petite expérimentation en vue de faire augmenter le niveau des globules blancs chez Lyne.  Les données montraient que depuis décembre, le niveau chutait et, bien que l'oncologue disait de ne pas s'inquiéter, que si le nombre passait sous le niveau plancher de 4,00, il était pour élever le niveau avec une injection (le but étant de ne pas arrêter le traitement avant qu'il soit terminé), nous étions Lyne et moi un peu inquiet.  Dans le livre de Servan Schreiber, on mentionne que par la consommation de champignons (certains étant plus efficaces que d'autres), il est possible d'augmenter le nombre de globules blancs.
Or donc, nous avons fait cette petite expérimentation avec la consommation 4 fois semaines de pleurotes et de shitakes (en plus de poursuivre la routine de 3 tasses de thé vert ou plus par jour, de manger des fruits et des légumes en bonne quantité, des crucifères surtout, et faire de l'exercice quotidiennement).  
Le graphique ci-dessous montre que lorsque Lyne a consommé des champignons en bonne quantité, ses globules blancs ont fait un bond positif, rien de faramineux, mais tout de même non négligeable. 

L'expérimentation se poursuit.  Lyne a décidé, après avoir discuté avec une femme très sympathique ce matin qui recevait également son traitement, d'ajouter une cuillerée à thé de curcuma avec une petite quantité de poivre et d'huile d'olive à ses légumes du midi. Béliveau et Servan Schreiber ne jurent que par ce curcuma qui, lorsque consommé au même moment que le poivre et du thé vert, a des effets incroyables pour la non prolifération des cellules cancéreuses.
Depuis une semaine, Lyne ressens des engourdissements dans ses orteils et dans les doigts.  Ça s'endure pour le moment.
Merci de vos mots, de vos pensées et de vos encouragements.  C'est bon de vous savoir autour.

dimanche 27 janvier 2013

Le sombre


Je demeure généralement positive. N’ai-je pas intitulé mon blogue « gratitude » ? Je me dis depuis le début de ce parcours que je ne dois pas me laisser abattre, me décourager où brouiller du noir. Je souhaite être reconnaissante pour le doux et le bon qui composent mes journées; pour mon compagnon extraordinaire qui me rappelle son amour à travers des milliers de gestes au quotidien … mais présentement, je me permets de dire que je me sens essoufflée, j’éprouve un moment de découragement. Il m’est difficile de regarder dans le miroir cette femme  au visage enflé que je ne reconnais pas, à sentir l’engourdissement de l’extrémité de mes orteils le soir venu. On m’avait avisé de ces « inconforts », mais je croyais pouvoir les éviter. Voilà que non. Je crains bien qu’ils s’accentuent, tel que prévu, comme la fatigue qui m’habite un peu plus chaque jour. Et il y a ces gens que nous aimons profondément et qui ne peuvent être là pour nous comme on souhaiterait tant qu’ils le soient, simplement parce qu’ils en sont incapables.

« Il nous faut un peu d’obscur pour bien voir, étant nous-mêmes composés de clair et de sombre »
Christian Bobin  

jeudi 24 janvier 2013

Pas de nouvelle, bonnes nouvelles

Une mise à jour s'impose en cette fin janvier, à mi-chemin de la seconde série de traitements au taxol.  Il ne reste que 6 semaines avant la fin des traitements de chimio. Un traitement par semaine.  On y arrive! 

Ce "On" exclu ici la personne qui écrit, en l'occurence, moi, Marc, le compagnon de Lyne. Depuis le début de toute cette aventure, j'accompagne ma douce, au jour le jour, je fais mon possible pour alléger tant bien que mal le poid de la maladie. C'est cependant elle qui porte la maladie et le stress psychologique qui lui est associée.  Ça, je ne peux lui enlever. Paradoxalement, j'ai souvent l'impression que c'est elle qui allège mes jours, qui donne toutes ces couleurs aux heures que je passe à ses côtés. Ma Lyne est forte, elle est dynamique et ne se laisse pas abattre.  De l'extérieur, on pourrait croire que notre vie est triste et sombre à l'idée de ce cancer au-dessus de nous, à chacun de nos pas...et bien, non.  Lyne rayonne et nous vivons chaque jour quelque chose de vraiment très spécial.  Nos journées commencent normalement assez tôt (et oui, je dis nous, car je suis en sabbatique depuis le début de l'année). Un 30 minutes de Qi-Gong, suivi de notre déjeuner et d'une marche d'une heure. L'après-midi, c'est le départ dans la création.  Lyne s'installe dans son atelier, alors que je pars à la bibliothèque du quartier afin d'écrire.  Nous sommes tous les deux en période de création, de production, jusqu'au souper.  LE BONHEUR TOTAL!!  La soirée est laissée à l'inspiration du moment, il faut se laisser un peu de liberté.

Je vous entends crier: "ET les pleurotes?" Et bien, pour l'instant, rien de très concluant.  Malgré deux semaines où j'ai fait manger des pleurotes, des shitakes et des portobellos à Lyne, ses globules blancs ont continuer leur chute. Nous poursuivons tout de même sur ce régime anticancer...les effets se feront peut-être sentir sur le long terme. Nous sommes très confiants.

Pour ce qui est de la production de l'artiste.  Je m'excuse d'avoir un peu paressé durant les dernières semaines.  Lyne a déjà terminé une cinquantaine (50) d'oeuvres.  Je vous mettrai une photo d'ici la fin de la semaine.  Je vous disais qu'elle rayonnait, je pèse mes mots.  Ma Lyne est en feu sur le plan artistique.  Nous sommes allés visiter des galeries et autres endroits où il serait possible d'exposer et nous croyons bien qu'une exposition sera possible à l'automne.  Quoi de plus stimulant que d'avoir un tel projet!!

Et je vous laisse sur une petite pensée:

"Quand on aime quelqu'un, on a toujours quelque chose à lui dire ou à lui écrire jusqu'à la fin des temps."
Chrsitian Bobin (Geai)

 


mercredi 9 janvier 2013

Pleurotes pas pleurotes


J’ai reçu aujourd’hui le quatrième traitement du second protocole de chimiothérapie. J’en suis au tiers du nombre prévu de ce dernier. Il ne reste donc que deux mois de chimiothérapie. Je me sens positive, même si pour la deuxième semaine consécutive, mes globules blancs sont à la baisse. Si leurs nombres diminuent en deçà d’une quantité indiquée, il se pourrait que je sois forcée de prendre une pose de la chimiothérapie de manière à donner la possibilité aux globules blancs de se régénérer plus rapidement faute de quoi on me ferait des injections facilitant ce processus de régénérescence.

Je me suis mise à la relecture d’Anticancer, ce livre extraordinaire de David Servan-Schreiber que j’avais lu l’été dernier. À la suite d’une période des Fêtes où j’ai fait certains écarts dans mon alimentation, il s’avère que c’est une lecture motivant résolument la prise en charge de ma santé physique et mentale, et je le recommande fortement à tous. Il s’agit pour moi d’une bonne révision de tous les aliments anticancers liés au cancer du sein, entre autres, mais aussi de la découverte de certaines informations qui m’avaient échappé.

Malgré les soins attentifs prodigués par les spécialistes, malgré leur patience et leur gentillesse face à des personnes confrontées au plus grand désarroi, les réponses obtenues aux questions portant sur l’alimentation sont tout à fait stéréotypées : « Mangez ce que vous aimez. De toute façon, ça ne fait pas une grosse différence. » Il est pourtant incontestable que le nombre de femmes orientales souffrant d’un cancer du sein, entre autres, est beaucoup moins élevé que chez les femmes occidentales, et il a été prouvé que la cause en est largement liée à l’alimentation. À l’hôpital, on m’a dit qu’il n’y avait rien à faire pour accroître le nombre de mes globules blancs. Servan-Schreiber affirme pourtant que dans des études universitaires japonaises, les patients qui reçoivent des extraits de champignons voient le nombre et l’activité de leurs globules blancs augmenter notablement, y compris à l’intérieur même de la tumeur. Anticancer affiche un magnifique tableau de différents champignons agissant sur la croissance des cellules du cancer du sein, avec les pleurotes en tête. Je connais de nombreux aliments anticancers figurant depuis des mois dans mon alimentation quotidienne, mais je miserai dorénavant sur les facteurs synergiques des aliments. Consommer, par exemple, du thé vert avec des pleurotes au même repas, augmentent les propriétés bénéfiques de ces aliments. Et pourquoi ne pas y ajouter un morceau de chocolat noir!

Si certains disent que les résultats de telles et telles recherches ne sont pas prouvés, il est tout de même parfaitement établi que le type d’alimentation que j’adopte ne fait courir aucun danger à ceux qui le suivent et entraîne, au contraire, des bienfaits pour la santé qui dépassent largement le cadre du cancer. Ce qui signifie qu’au minimum, en suivant ces principes, on se fait beaucoup de bien. Je vous tiendrai au courant de l’effet de ma consommation de pleurotes sur le niveau de mes globules blancs.



Bonne année 2013 à tous!!