mercredi 28 novembre 2012

Moment de création

On a tous un lieu où l'on se sent extrêmement bien, où l'on sent que tout est possible, un endroit où l'on peut pleinement se sentir vivre et vibrer.  Cet endroit, c'est son atelier.  C'est là que Lyne puise son énergie, là où elle prend son envol.  J'adore arriver à la maison et voir son sourire au moment où elle me dit: "ferme les yeux", jusqu'à ce qu'elle me dévoile ses trésors.

lundi 26 novembre 2012

La mi-chemin de la chimiothérapie


Demain matin, je recevrai le quatrième et dernier des traitements d’adriamicyn et de cyclophosphamide. J’en suis bien contente, car il s’agissait, selon les dires de mon oncologue, de la part la plus difficile du parcours. À compter du 18 décembre, j’entreprendrai les traitements de taxol qui auront lieu toutes les semaines pendant trois mois. J’en suis donc à mi-chemin en ce qui concerne la chimiothérapie. Je devrais m’en réjouir.  Toutefois, ce soir, je suis fatiguée et j’anticipe un peu ce qui m’attend demain. Pour compenser, j’ai fait appel aux services d’une massothérapeute en oncologie du Royal Victoria qui s’occupera de me faire du bien pendant le traitement. Je vais tenter de garder ma tête fixée sur cet aspect de la matinée! 

Je suis reconnaissante envers nos familles qui ont eu l’idée touchante de joindre leurs pensées à un moment de la semaine où tous étaient disponibles afin de créer un faisceau d’amour pour nous envelopper Réjean (mon cher beau-frère, pris d’un cancer de la rate) et moi.  La foi, dit-on, déplace les montagnes.  Merci pour cette radiothérapie d’amour.  

Je vous envoie de gros bisous « push push » (vaporisateur), comme ceux, adorables, que m’ont fait Mya et Zoé en fin de semaine.

dimanche 25 novembre 2012

Symphonie no 3, dite « des chants plaintifs » - Henryk Górecki


La symphonie no 3, dite « des chants plaintifs », du compositeur polonais Henryk Górecki, a connu un succès inattendu lorsque son enregistrement par la London Sinfonietta, en 1992, s’est vendu à plus d’un million d’exemplaires dans le monde et devint, de tous les temps, l’album le plus vendu d’un compositeur contemporain. Ce n’est pourtant pas l’œuvre de Madonna, ou Britney Spears, mais une musique sombre, poignante, tirée de textes profondément religieux – le second mouvement s’inspire des mots d’une prière à la vierge Marie retrouvée sur les murs de la cellule d’une prisonnière polonaise dans le siège de la Gestapo à Zokopane, dans le sud du pays. Górecki fait partie d’un groupe de compositeurs radicaux qui écrivaient de la musique souvent exempte de rythme ou de mélodie et centrée surtout sur la tonalité; plus celle-ci était crue, forte et discordante, mieux c’était. Pour Górecki, la musique devait toujours être significative et porteuse d’un message. À l’instar du rythme lent d’une longue prière rituelle sourde et angoissante,  la symphonie des chants plaintifs exige l’attention de celui qui écoute pendant une heure. Ces trois mouvements tout en lenteur, progressent des basses graves, presqu’inaudibles aux instruments à cordes jusqu’à ce que l’orchestre entière soit engagée dans toute sa gloire.

La souffrance, la peur, l’angoisse sont des sentiments réels. Bien que je sois fort consciente de l’importance d’être positive, de profiter de tout ce que la vie m’offre de doux et de bon, je suis tout aussi consciente de la valeur de savoir regarder la réalité en pleine face. J’ai un cancer et même si mon pronostic est favorable, l’impact des traitements de chimiothérapie m’ébranle. La sensation d’avoir le corps chargé de produits chimiques est troublante. Et il en est de même pour la vue de mon visage et de mon corps enflés, pour la perte de mes cheveux, sourcils, cils, et poils, pour mon insomnie causée par la surcharge de cortisone. L’idée des nombreuses cellules saines qui sont détruites en même temps que les mauvaises aussi, et d’une éventuelle mastectomie.

S’il est important d’être positive quant à toutes ces inquiétudes qui m’assaillent par moment, et d’AGIR, il est avant tout important d’y faire face. Ces craintes sont authentiques, elles sont tout à fait légitimes, HUMAINES et avant de pouvoir passer à autre chose, je me dois de reconnaître leur présence en moi. C’est ce qui me permet ensuite de les apprivoiser et, par la suite, d’en apprécier la valeur dans mon parcours humain.

Autant que la musique de Górecki peut déranger, mon cancer me dérange. Je ne peux faire abstraction de sa présence.  Au contraire, je le laisse m’atteindre et, actuellement, je m’en sers afin d’exprimer le plus « précisément » ce qu’il me fait vivre. Je lui donne une voix à travers mes œuvres, et mes œuvres traduisent visuellement les sensations que produit en moi ce cancer.

À quoi peut-on attribuer le grand succès de la symphonie no 3 d’Henrick Górecki ? Au-delà du fait qu’il s’agit d’une musique profondément belle et certainement unique, le « minimalisme sacré » de Górecki a su exploré le besoin profond des gens, en ces temps profanes et incertains, pour ce qui a un sens, pour ce qui touche au divin, pour ce qui est réconfortant et sécurisant d’une manière plus profonde que ce que nous offre maintenant notre civilisation contemporaine. Voici ce qu’en déclare une critique :

… l’une des œuvres les plus sombres et tristes qu’il soit donné d’entendre. La liberté artistique propre aux contemporains permit à Gorecki… d’aller à l’essentiel… grâce à une science acquise en maître de la musique contemporaine, de ne pas enjoliver, de ne plus compliquer… nous voici donc, avec lui, au plus profond. A l’aide de quelques notes, d’harmonies bouleversantes, il vous cerne le cœur, il l’écrase… il vous oppresse le corps. Tout semble pourtant calme, le lento médian est d’une beauté éthérée et lumineuse à faire pleurer les morts… cette symphonie se tait, mais fait hurler votre âme. Une voix de sirène et qui pleure avec grâce, une vision des abysses… un des plus immenses chefs-d’œuvre de la musique pour larmes.

Je suis reconnaissante à Henrick Górecki d’avoir cru à l’essentiel, d’avoir eu le courage d’aller au plus profond des abysses nous ayant permis d’apprécier cette œuvre divine monumentale dont je m’inspire aujourd’hui dans la création de mes œuvres.  

vendredi 23 novembre 2012

Écris ta vie sur moi

Ce soir, je suis revenu du bureau avec le coeur qui vibrait au son d'une chanson de Richard Séguin; sa voix chaude parlait d'un sentier secret. En quelques minutes, j'étais complètement ému et j'avais peine à retenir mes larmes. Ce "sentier secret" c'est ce chemin intime, cette voie où on laisse entrer l'être aimé, cet endroit où, sans crainte d'être vulnérable, on permet à l'autre de nous rejoindre, ce lieu illuminé, bien collé sur notre âme.

Le lien qui existe entre Lyne et moi, cette force qu'insuffle nos échanges et l'écoute et le respect qui les enveloppent, ces mots que l'on se murmure, ces regards qui nous traversent, ce sentiment de confiance qui m'habite et ce désir d'engagement qui caractérise chacun de mes pas à ses côtés depuis que nos chemins se sont croisés, tout cela à un prix. Ce que tu affrontes, je l'affronte aussi. Tes souffrances et les inquiétudes qui assaillent tes jours comme tes nuits teintent le rythme de mes pas. Malgré tout, je dis OUI! Écris ta vie sur moi aujourd'hui et demain et vivons ce que la vie nous offre.

L'émotion qui pressait mon coeur ce soir trouvait sa source dans les craintes que ce cancer fait naître et l'approche de cet autre traitement que devra recevoir Lyne mardi prochain.  Chaque traitement rapproche ma douce d'une guérison; chaque traitement porte néanmoins la mort, celle de nombreuses cellules saines qui l'habitent.  Depuis 5 mois, chaque jour est un défi, pour elle comme pour moi, et même si tous deux demeurons bien positifs et prenons plaisir à prendre soin l'un de l'autre, à surveiller notre alimentation ainsi que notre santé tant physique qu'émotionnelle, il y a de ces moments où nous nous sentons fragiles.  Ce soir, c'est mon tour. Quand je suis entré et que j'ai fait jouer cette chanson de Seguin et que je t'ai amenée danser au salon, bien collé, c'était pour moi, j'avais besoin de tes mains amoureuses et rassurantes. Aimer, c'est aussi, parfois, souffrir de devoir accepter la vie dans ce qu'elle a de moins rose.

jeudi 15 novembre 2012

Le personnel médical


La semaine dernière, Marc et moi passions le weekend à Ottawa dans le but de changer d’air, visiter de la famille, nous rendre au Musée National, nous promener dans le marché Byward… ce qui fut bien agréable. Toutefois, le prix à payer a été un séjour de deux jours à l’hôpital Royal Victoria faisant suite à une gastro-entérite avec fièvre. Il faut ce qu’il faut.

Nous avons eu tellement de compassion pour le personnel hospitalier qui se démenait sans arrêt pour les patients qui semblaient tapisser chacune des parois murales du département. Ils étaient appelés au secours et réagissaient avec dévouement aux malades qui, inquiets, alarmés, exigeaient leurs services. Il y a bien eu, à tort ou à raison, quelques gestes impatients de la part d’infirmiers et d’infirmières à bout de souffle. C’était toutefois bien peu, considérant les tours de magie qui sont exigés de leur part. Bravo à toutes ces équipes médicales qui, jour après jour, tout au long de l’année, se dévouent pour notre mieux-être.

La morale de cette histoire : je serai encore plus que vigilante quant à l’hygiène alimentaire surtout. Je prie tous les gens qui ont la gentillesse de nous inviter à partager un repas de prendre bien soin de vous laver les mains, les outils et les surfaces de cuisines de manière exagérée. Le système immunitaire des gens qui ont un cancer et qui subissent des sessions de chimiothérapie est à son plus faible, ce qui signifie qu’ils ont plus que jamais la possibilité d’attraper tout ce qui passe. On a besoin de votre aide. Aussi, il faut noter que nous évitons les bisous et les câlins pendant toute cette période pour les mêmes raisons. Mais, n’allez pas penser qu’on ne vous aime pas! On se reprendra bien plus tard.  Je vous aime!!

vendredi 9 novembre 2012

Simplifier la vie



Marc m’a lu, il y a quelques soirs, cet extrait de Où tu vas tu es de Jon Kabat-Zinn. Je l’écris intégralement, car je crois profondément en l’importance de ce que soulève l’auteur. Je souhaite tendre vers ce mode de vie et je suis reconnaissante envers les grands penseurs comme Thoreau qui ont pavé la route afin que nous puissions suivre leur trace. Je suis consciente que cela peut représenter le travail de toute une vie, mais il est l’heure du départ :  

Il m’arrive souvent d’avoir l’impulsion d’introduire quelque chose en plus dans le moment présent. Encore un coup de téléphone, encore un petit arrêt sur mon chemin avant d’arriver ici.

J’ai appris à identifier cette pulsion et à m’en méfier. Je travaille dur à lui résister. Elle m’incite à lire pour la énième fois le contenu diététique sur la boîte de céréales en prenant mon petit déjeuner. Cette impulsion se nourrit de n’importe quoi pourvu que ça occupe ailleurs. Le journal du matin est la tentation idéale, ou le catalogue de jardin, ou n’importe quel écrit qui traîne. Elle récupère tout pour m’abrutir avec la complicité de mon esprit embrumé. Elle me remplit le ventre sans que je puisse vraiment apprécier mon petit déjeuner.

Cette pulsion ravageuse me rend parfois indisponible à ce qui m’entoure. Ainsi, je ne vois pas le rayon de lumière jouer sur la table, je ne sens pas la bonne odeur du bacon en train de frire. Je suis distrait par les énergies éparpillées autour de moi, les discussions et les querelles de la famille qui est réunie avant de se disperser pour les diverses occupations de la journée.
Il me plaît de simplifier ma vie afin de contre-carrer de telles impulsions et de permettre à toute nourriture d’alimenter mes racines profondes. Cela signifie que je m’efforce de ne faire qu’une seule chose à la fois. D’être disponible aussi. Pendant une journée de nombreuses occasions se présentent : aller se promener, en passant quelques instants avec le chien pendant lesquels je suis entièrement à lui. Simplifier la vie veut dire moins de déplacements au cours d’une journée, voir moins afin de voir mieux, faire moins afin de faire plus, acquérir moins afin de posséder plus. Tout est lié. Pour moi, père de famille, mari, fils aîné de mes parents, très impliqué dans mon travail, l’impulsion de partir m’asseoir sous un arbre dans la forêt, de vivre auprès d’un étang de Walden, d’écouter l’herbe pousser, de voir les saisons changer, pose un sérieux problème. Cependant, parmi le chaos organisé, la complexité de la vie de famille, ses frustrations et ses dons merveilleux, il y a toujours moyen de choisir la simplicité dans les petites choses.

Ralentir le rythme nous simplifie la vie. Ordonner à mon corps et à mon esprit de rester tranquillement avec ma fille au lieu de répondre au téléphone. Ne pas suivre l’impulsion de téléphoner à quelqu’un qui « a besoin d’être appelé » justement à ce moment-là. Ne pas céder à la pulsion d’acheter n’importe quoi en écoutant les sirènes de la publicité sous toutes ses formes. D’autres moyens de simplifier la vie sont peut-être de rester chez moi un soir, sans rien faire de particulier, en lisant un livre, en me promenant seul ou avec l’un de mes enfants ou ma femme. Ou encore d’empiler les bûches sur le bûcher, ou de contempler la lune ou de sentir sur mon visage la douceur de l’air sous les pins. Je pourrais aussi aller me coucher tôt.
Je m’efforce de dire non, afin de me simplifier la vie, mais c’est difficile. C’est véritablement une discipline ardue qui mérite tous nos efforts. Parfois, il s’agit d’un choix délicat, car il y a des opportunités et des demandes auxquelles il faut répondre. Cela exige une adaptation, une réévaluation constantes. Mais je me suis rendu compte que le principe de simplifier les choses de ma vie me rend attentif à ce qui est important, à la corrélation entre l’esprit et le corps et l’univers entier. On ne peut jamais tout contrôler; mais le choix de la simplicité ajoute à l’existence un sentiment de liberté qui nous échappe si souvent et l’occasion de découvrir que le moins est peut-être le plus.

Pour faire suite à plusieurs réflexions en ce sens, Marc et moi avons décidé d’éliminer la télévision de notre salon. Il s’agit pour nous d’un geste significatif auquel s'ajouteront d’autres modifications qui tendent vers une simplification de notre vie telle que nous la souhaitons.   

mercredi 7 novembre 2012

The new me

Zosha from Romania


Tout au début, lorsqu'on m'a suggéré d'essayer perruques, maquillage, froufrou, je me suis dit qu'il n'en était pas question. Et puis, dernièrement, assise à attendre pour mon troisième traitement de chimio, il m'est venu à l'idée d'aller essayer quelques perruques, pour passer le temps. J'ai eu un plaisir fou, je suis allée chercher Marc dans le but de partager cette drôlerie, et de là est né l'idée de transformer mon apparence, comme bon me semble, à divers moments de ce parcours, par pur plaisir. Je vous laisse découvrir les multiples facettes de la Lyne que vous ne connaissiez pas... et moi non plus.

mardi 6 novembre 2012

Troisième traitement/ Third treatment

Voilà, c'est fait.  Le troisième traitement est complété.  Le prochain sera, à ma grande surprise, le dernier de cette première série. Par la suite, à partir du 18 décembre, j'aurai un traitement par semaine; ce qui devrait m'amener au début mars pour la fin de mes traitements en chimiothérapie.  Je me réjouis déjà du fait que les nausées ne seront pas du programme pour cette seconde série de traitements.

J'aurai une belle surprise pour mes lecteurs demain. Vous y découvrirez un des aspects de ma personnalité encore non dévoilé.

That's it, the third treatment is done.  In three weeks from now, i was quite surprise to hear this, I will receive the last BIG chemo treatment.  What a relief!  Beginning Décember 18th, I will receive one treatment per week untill the beginning of March.  I am already gratefull that these new treatments will not make me nauseous.

Tomorrow, I will give my blog readers a real BIG surprise as I will reveal one aspect of my personality that i kept for myself for too long.

dimanche 4 novembre 2012

Prendre mon plaisir au sérieux

Je suis l’aînée de quatre enfants, la seule fille. J’ai un sens de la responsabilité débordant et je suis atteinte du syndrome de perfectionnisme. Quelqu’un m’a dit il y a de nombreuses années, « tu n’es pas seule, tu n’as pas à tout prendre sur tes épaules, tu peux demander de l’aide. » Longtemps, je préférais tout faire moi-même. Ça irait plus rapidement, je n’aurais pas à attendre pour qui que ce soit et ce serait fait à mon goût. Il s’avère que maintenant, et c’était ainsi bien avant la nouvelle de mon cancer, je n’ai plus l’énergie pour tout faire. J’ai compris que chacun fait les choses différemment, ni mieux, ni pire que moi. J’ai compris, je sais. Toutefois, c’est tellement ancré dans ma façon de vivre, que j’ai peine à modifier ce comportement. Néanmoins, il le faut. C’est mon corps qui le réclame. Il y a bien entendu, des occupations quotidiennes dont je dois m’occuper. Toutefois, m’amuser, rire, flâner sont des activités tout aussi importantes pour mon esprit comme pour mon corps. Nous vivons dans une société centrée sur ce que l’on doit faire et il va de soi que ne rien faire soulève en nous un sentiment de culpabilité et de lâcheté. Mes quelques expériences et mes lectures sur la méditation m’amènent à comprendre que ne penser à rien, ne rien faire, être tout simplement, nourrissent le corps et l’âme. Il a été prouvé que le plaisir a un pouvoir de guérison sur de nombreuses maladies.  Il est grandement temps que je prenne mon plaisir au sérieux.